Un monde d'alter, dont surgit un moi davantage en complétude et en finitions. Des yeux plus vastes, le lâchage panoptique, le savoir en route. Le don intégral du soi ou de sa partie meilleure. Etrange est la façon dont tous ces êtres s'entremêlent ici, en masse uniforme et coulante. Cette masse omniprésente et suffocante. Cette masse qui pèse telle une chape de plomb et dont on ne voit pas le terme. La densité d'êtres emplissant le paysage devient terrifiante. Leur nombre fait peur. Le manque d'espace et de liberté même physique effraie. |
Chacun déambule dans la plus totale indifférence, des traits qui le caractérisent : le mendiant, le clochard, le riche, l'aveugle, le sacré, le lépreux, l'Intouchable, le vendeur de thé, l'amputé, la vendeuse de boissons fraîches qui se retrouve aveugle d'un œil. Ici, manchots, aveugles et lépreux vadrouillent sans que personne n'y prête la moindre attention. Les regards ne se posent pas sur eux, même pas de manière furtive. Personne ne les remarque. Plus personne ne les remarque. Ils sont usés de leur cachet. Habitude de la souffrance et de l'atroce, déformations du physique qui attireraient à l'inverse compassion ou rejet dans le douillet Occidental. Ici, l'homme paraît égal. | |
D'un autre côté, l'inégalité ne m'est jamais apparue aussi convaincue qu'ici. En Inde, tout est contraste et contradictoire. La logique existe, elle est même imparable. Elle est juste autre, elle est leur. Elle n'est accessible du mort vivant, et ne s'acquiert qu'en élévation d'au-delà. Elle est faite de normes sociales. Elle se fonde de religion, de castes prédéfinies par celle-ci et acceptées telles qu'elles par une population de fervents Hindous.