J'ai commencé hier à Dya dhan, un orphelinat fondé par Mère Thérésa. A 6 heures, dring dring ...le réveil qui sonne. Ce bruit que je déteste (peut-être le plus horrible son qui puisse exister au monde ...). Je me lève, la douche sous ce jet d'eau tellement rafraîchissant qui tombe brut en ligne droite, violemment de cette canalisation avortée du plafond. La brosse à dents, mes sandales et j'étais dans le quartier musulman à marcher comme un zombie, au rythme des chants du mueddin qui récitait ses prières du haut de sa tour. Et toujours la même ambiance : Calcutta qui s'éveille, les quelques gens qui se reposent encore à 6h30 du matin sur le trottoir, les rickshaw qui te proposent déjà de t'emmener pour quelques roupies je ne sais trop où, et les hommes et enfants qui se lavent en jupes à la douche ...dans la rue. Ces douches qui sont de petits endroits aménagés aux coins des rues avec des pompes et des carrelages, où hommes se tiennent ensemble, vêtus de leur longis, à s'enduire de savon et à s'asperger d'eau de toute part, avant d'attaquer la journée rude et torride. Ils se brossent les dents avec des morceaux de bois, une sorte de réglisse made in India. Frappant est le fait de constater combien ils sont propres et nets de leur personne : toujours bien rasés, les cheveux soigné, leurs vêtements très corrects, alors qu'ils se lavent dans le confort d'une pompe aménagée au coin de la rue, dans un sanitaire commun où les femmes vont ensuite laver le linge plus tard en journée. Je dis " coin de la rue " et non " bout du trottoir ", car dans ces quartiers, il n'y a pas de " trottoirs " à proprement parler.
Photo de Pascal Mannaerts La voie des passants et des rickshaws ou charrettes est la même, ils sont obligé de se manifester pour fendre les foules désorganisées et déambulant spontanément. Quand je passe à leur hauteur, je les salue, ils prennent toujours le tout avec humour, ils me font signe de me joindre à eux pour partager ce moment aquatique, comme des gosses t'inviteraient en rigolant à la baignade. Et ces sourires, et cette bonne humeur, qui t'envahit déjà de grand matin, avec les premiers rayons du soleil qui habillent ces quartiers pauvres de leurs tons orangés. Les premières odeurs de biscuits ou samosa cuits à la friture, les échoppes qui garnissent leurs étals de fruits remplis de mouches, ou de pâtisseries typiques qui s'empilent, formant de petites pyramides safran, blanches ou rouges. Les enfants qui partent à l'école en uniforme, d'autres qui errent à la rue, les cheveux crépus et broussailleux, nu pieds, la mine envoûtée, qui passent devant toi le regard vide et qui parfois, si tôt dans la journée, ne pensent pas encore à te demander des roupies. La foule qui se disperse soudain, pour laisser passer un rickshaw, avec à son bord un gros ou une grosse Indienne qui s'offre son service, et qui regarde la foule du haut de son char.